
Bonjour ma Cécile,
Voici une lettre que j’ai ouverte par mégarde.
Tu ne m’en voudras pas j’espère, le papier était bleu pâle et l’écriture fébrile, j’ai eu le bel espoir qu’un admirateur me l’avait envoyée pour me révéler enfin sa passion secrète.
Ça arrive parfois.
Toute attisée et curieuse, j’ai déchiré l’enveloppe et cherché la signature.
« Mag » avait signé.
Mag ?..
…Tiens, ça ne me dit rien.
Rien du tout.
Je m’étais bien longuement entretenue avec un certain Margorin lors d’un séjour en Angleterre, un vieil aristocrate qui passait ses journées sur un banc à lire d’épais volumes, mais il avait déjà à l’époque 92 ans passés.
J’avais connu aussi un Magola, c’est vrai… un danseur africain, long comme une liane, noir et doux comme l’ébène et beau comme personne dans la lueur de la lune.
Mais non, il avait disparu un jour dans une foret et n’en était jamais revenu.
Maguy peut-être… Il avait presque un nom de fille, mais n’en avait jamais aimé une seule, il réservait ses écrits aux éphèbes qu’il avait longuement caressés lors de ses voyages.
Magor ..?… Mon Dieu ce Magor ! Poilu, viril, musclé, une force mythique à métamorphoser un lit en arène romaine. Magor le tempétueux… Magor l’impétueux…
Mais non, dans mon souvenir, il ne savait ni lire ni écrire.
Magdalin….voilà ! Ça ne pouvait être que Magdalin… Fin, très fin, comme une brindille sertie de lunettes. Une touffe d’herbe sèche sur la tête et un bouquin sous le bras.
Mais on m’avait dit de lui qu’il s’était un jour envolé dans le vent de l’hiver et que personne ne l’avait revu depuis.
Magax, le viking ? Ce vieux fou avec sa hallebarde ?
Non.
Alors, je me suis dite – Mais… ! C’est peut-être pour Cécile !
Ah oui !… D’ailleurs, c’est écrit sur l’enveloppe.